Le locataire évincé, protégé par le droit commercial est en droit d’exiger cette somme qui compensera la perte physique de son local commercial. Cependant, dans quel contexte cette indemnité peut être versée et comment calculer son montant ? Quelles sont les exceptions à la règle ?
Quel est le champ d’application de la règle ?
En France, le locataire évincé d’un bail commercial est protégé car le fonds de commerce exploité à l’adresse dite, est une propriété commerciale. Un déménagement peut mettre en péril son exploitation et donc, son chiffre d’affaires. Afin de protéger le paysage commercial français l’indemnité d’éviction a été mise en place. Cette règle permet de dissuader les bailleurs qui souhaitent rompre leurs baux commerciaux sans raison valable de prendre cette décision.
De ce fait, il est strictement interdit à un bailleur de refuser un renouvellement de bail commercial sans en contrepartie procéder au versement d’une indemnité d’éviction au preneur.
L’article 145-15 du Code du Commerce régie cette protection envers le locataire car il est prévu que :
« Sont nuls et de nul effet, quelle qu'en soit la forme, les clauses, stipulations et arrangements qui ont pour effet de faire échec au droit au renouvellement (...) ».
Ce droit est applicable dans le cadre d’un bail commercial classique de 3/6/9 ans et non dans le cadre d’un bail dérogatoire ou précaire. La précarité de ces derniers baux confère à ses occupants et à leurs bailleurs l’assurance de pouvoir rompre un contrat de location sans indemnités et sur une durée déterminée.
Quelle est la procédure à suivre pour le bailleur pour évincer son locataire ?
Le bailleur doit manifester son souhait de résilier le bail commercial par acte extrajudiciaire dans lequel sera stipulé le droit à une indemnité d’éviction envers le locataire.
Le bailleur peut évincer son locataire dans plusieurs cas :
- En cas de congé ou tacite prolongation 6 mois avant la période triennale.
- En cas de refus d’une demande de renouvellement.
- En cas de manquement du locataire à ses obligations contractuelles.
Dans tous les cas, le bailleur devra faire connaître au locataire sa volonté de mettre fin au bail commercial par le biais d’un acte extrajudiciaire.
Quelles sont les exceptions au versement de l’indemnité d’éviction ?
Il existe des exceptions à l’obligation de paiement d’une indemnité d’éviction :
- Si le locataire n’est pas ou plus immatriculé au registre des commerces.
- Si le locataire ne justifie pas d’une exploitation effective de son fonds de commerce depuis 3 ans.
- L’immeuble où est situé le local commercial loué est jugé insalubre selon les autorités compétentes.
- En cas de manquement des conditions exigées par le bailleur au locataire (défaut de règlement du loyer, local commercial vide). Il peut s’agir également d’une déduction faite au titre de l’obligation de dépollution et de remise en état du site comme le prévoit un arrêt rendu par la troisième chambre civile de la Cour de cassation (Cass, Civ 3, 11 septembre 2013).
- Les baux précaires et dérogatoires.
- Pour les conventions d’occupation précaire.
Ce qu’il faut retenir de l’indemnité d’éviction
La règle est donc claire, lorsqu’elle concerne un locataire évincé, une indemnité d’éviction lui sera accordée en cas de rupture de contrat non-désirée. L’unique but est de protéger le locataire d’un changement d’environnement qui impacterait son activité. Le montant de l’indemnité doit être fixé d’un commun accord entre les deux parties (bailleur et preneur), avec toutefois quelques règles à respecter. En cas de conflit entre le bailleur et le locataire évincé le juge pourra fixer le montant de l’indemnité d’éviction.
À noter : Preneur ou propriétaire de locaux commerciaux vous pouvez peu importe votre situation, vous faire aider par un avocat. Les avocats peuvent vous renseigner sur toutes vos problématiques juridiques (règlement de loyers de locaux commerciaux, motif et délai de résiliation d’un bail commercial, état des lieux, clause du bail commercial, cession de clientèle ou encore indemnité d’éviction …).
Comment est fixé le montant de l’indemnité d’éviction ?
Une indemnité d’éviction a pour but de compenser un préjudice financier subi par le locataire évincé comme le rappelle un arrêt rendu par la troisième chambre civile de la Cour de cassation (Cass, Civ 3, 7 novembre 1978).
Le paiement de cette indemnité d’éviction n’emporte pas acquisition du fonds de commerce en vertu d’un arrêt rendu par la Cour d’appel de Paris (Paris, 13 septembre 2002).
Cette somme peut être définie à l’amiable entre ce dernier et le bailleur. Il existe des experts capables d’évaluer le montant de l’indemnité d’éviction à la date du préjudice qui sera principalement basé sur la valeur du fonds de commerce en vertu d’un arrêt rendu par la troisième chambre civile de la Cour de cassation (Cass, Civ 3, 20 mars 2007).
Il faut se placer à la date du refus de renouvellement pour évaluer le montant de l’indemnité d’éviction et les conditions de sa mise en oeuvre comme le rappelle un arrêt rendu par la troisième chambre civile de la Cour de cassation (Cass, Civ 3, 14 novembre 1968).
Il n’existe pas de règle de calcul précisée dans le Code du commerce. Toutefois, l’article L. 145-14 du Code de commerce prévoit que cette indemnité doit comprendre :
Par conséquent, en cas de mésentente, cette affaire pourra être portée devant le juge compétent qui à nouveau, prendra conseil auprès d’experts judiciaires. En cas de désaccord avec le bailleur, le juge pourra tout simplement interdire le refus du renouvellement.
Le juge pourra fixer le montant de l’indemnité d’éviction en vertu de son pouvoir souverain d’appréciation comme le rappelle un arrêt de la troisième chambre civile de la Cour de cassation (Cass, Civ 3, 15 octobre 2008).
Cette indemnité d’éviction ne peut pas être fixée à une somme forfaitaire comme le rappelle un arrêt rendu par la troisième chambre civile de la Cour de cassation (Cass, Civ 3, 7 décembre 2004).
À noter : le bailleur peut être tenu au versement d’indemnités complémentaires qui viennent en accessoires de l’indemnité d'éviction telles que :