Qu'est-ce qu'un bail précaire ?

Si vous souhaitez louer un local afin d’y installer votre activité commerciale, artisanale ou industrielle, vous vous tournerez naturellement vers un bail commercial. Cependant, pour certaines raisons vous n’aurez parfois pas la volonté ou la possibilité de vous engager dans une location à long terme, c’est pour ce type de situation que le bail précaire existe.
Estelle BOCCARA - Responsable du contenu juridique
Estelle BOCCARA
Responsable du contenu juridique
Publié le :
4 novembre 2020
Temps de lecture :
6 min

Le bail dérogatoire

Nous verrons d’abord quelles sont les caractéristiques d’un bail précaire. Puis nous nous pencherons longuement sur le contenu du contrat d’un bail précaire.

Attention : Le bail précaire ou dérogatoire se distingue de la convention d’occupation précaire. 

Quelle différence ?

Le bail dérogatoire : le bail dérogatoire est appelé régulièrement bail précaire mais il ne se caractérise pas par sa précarité. Il s’agit d’un bail d’une durée de trois ans conformément à l’article L. 145-5 du Code de commerce. Ce bail ne se caractérise pas par sa précarité mais par sa courte durée de trois ans. 

Attention à l’utilisation du terme ‘’ bail précaire ‘’ pour qualifier le ‘’ bail dérogatoire ‘’ à ne pas confondre avec la convention d’occupation précaire qui est une notion bien différente.

La convention d’occupation précaire : il ne s’agit pas d’un bail mais d’une convention, le propriétaire des locaux peut décider de mettre fin à cette situation à tout moment en raison de la survenance d’un événement prévisible et exceptionnel. Le bénéficiaire de cette situation est un occupant et non un locataire et doit s’acquitter d’une redevance et non d’un loyer. Cette situation n’est pas régie par le Code de commerce mais par la jurisprudence. Cette convention se caractérise par sa précarité en raison de l’incertitude régnant sur cette relation contractuelle. Troisième chambre civile de la Cour de cassation (Civ. 3e, 31 mai 1994).

Qu’est-ce qui caractérise un bail précaire ?

Le bail précaire (aussi appelé “bail dérogatoire” ou “bail de courte durée”) est un type de location de locaux commerciaux en vue d’exercer une activité commerciale ou artisanale. Les règles applicables aux baux commerciaux qui protègent si bien le locataire dans le bail commercial ne s’appliquent plus dans le cadre d’un bail dérogatoire ou précaire car ce dernier est réservé aux locations de très courte durée (moins de 3 ans). 

Ce bail dérogatoire est prévu à l’article L. 145-5 du Code de commerce qui détaille les différentes conditions à respecter pour conclure ce bail. La Loi Pinel du 18 juin 2014 précise à son article 21 que les dispositions issues de l’article L. 145-5 du Code de commerce sont applicables aux contrats conclus ou renouvelés à compter du 1er septembre 2014.

Le contrat du bail dérogatoire ou précaire

Conclure un contrat de bail dérogatoire ou précaire

La conclusion du contrat de bail dérogatoire ou précaire est soumise à quelques conditions particulières qui ne sont pas celles qui encadrent le bail commercial.

  • Conclusion du bail au moment de l’entrée dans les lieux par le locataire : Le contrat bail commercial doit être signé au moment où le locataire fait son entrée dans le bien. Un bail dérogatoire ou précaire peut être conclu à l’issue d’un bail commercial au moment du renouvellement du bail commercial classique à condition que ce dernier soit résilié. 

  • Durée maximum de 3 ans : La durée d’un bail de courte durée doit également être inférieure ou égale à 3 ans. Il peut s’agir d’un seul bail dérogatoire précaire de 3 ans ou de plusieurs baux dérogatoires ou précaires dont le cumul ne dépasse pas le délai de 3 ans. 

  • Volonté non équivoque des parties de déroger au droit commun : les parties doivent exprimer de façon claire et non équivoque leur volonté de déroger aux règles de droit commun qui encadrent le bail commercial. Aussi, les règles protectrices du bail commercial ne sont plus valables lorsqu’on conclut un bail précaire. Pour cette raison, les deux parties doivent absolument se mettre en accord sur la dérogation au régime de bail commercial. Cette volonté doit être mentionnée clairement dans le contrat de bail précaire.

À noter : le non-respect de ces trois critères entraîne par conséquent l’application automatique du droit commun applicable aux baux commerciaux. Autrement dit, le bail précaire serait requalifié en bail commercial. 

Un état des lieux d’entrée ainsi qu’un état des lieux de sortie doivent être réalisés afin de pouvoir conclure un contrat de bail précaire. Les états des lieux du bail précaire sont effectués de la même manière que l’état des lieux d’un bail commercial. Le locataire ne possède pas la propriété commerciale du local qu’il loue dans le cas d’un bail précaire, il ne peut en aucun cas céder ce bail. En revanche, il a la possibilité de sous-louer le bien concerné pendant la durée restante du contrat.

Quelle est la durée du bail dérogatoire /  précaire ?

Le bail dérogatoire ne doit jamais durer plus de 3 ans. On entend par là que la durée totale, en tenant compte des renouvellements, ne doit pas excéder 3 ans successifs. À l’issue de cette période de 3 ans, le contrat de location changera de nature. Le nouveau bail prendra la place de l’ancien soit par accord des parties soit par reconduction tacite. Dans les faits il restera très similaire, seulement dorénavant le bail aura le statut d’un bail commercial et non plus d’un bail dérogatoire / précaire.

À noter : pour les baux conclus ou renouvelés avant le 1er septembre 2014, la période est de 2 ans et non de 3 ans en vertu de l’article 3 de la loi n° 2014-626.

Les modalités de paiement des loyers du bail dérogatoire / précaire

Lorsqu’il s’agit d’un bail de courte durée, le preneur ainsi que le bailleur ont la liberté de décider comme ils le souhaitent les modalités de paiement ainsi que le montant en ce qui concerne le règlement du loyer. La règle du plafonnement des loyers n’a aucune influence dans ce cas de figure.

Le principe est celui de la liberté du montant et de l’évolution du loyer.

Qu’advient-il à la fin d’un bail dérogatoire / précaire ?

Il faut tout d’abord noter que les deux parties s’engagent lorsqu’elles s’accordent pour la création d’un bail dérogatoire. Le locataire s’engage à payer les mensualités dues jusqu’à la date convenue. Le bailleur quant à lui n’est pas autorisé à donner congé avant le terme du bail. 

Concernant la fin du bail dérogatoire / précaire, un renouvellement est possible, en restant cependant dans la limite des 3 ans que nous vous avons mentionné plus haut. Le locataire est ensuite prié de quitter le local à l’issue du contrat. Le propriétaire dispose d’un mois pour ordonner au preneur de se retirer, sinon, la location se poursuivra en tant que bail commercial de droit commun.

Dans le cas où les deux parties s'entendent pour un nouveau bail dérogatoire (à la suite d’un bail précaire d’une durée totale de 3 ans), le bail ne sera pas conforme à la loi et les parties s’exposent à une requalification automatique en bail soumis au statut des baux commerciaux.

Le locataire ne bénéficie dans ce cadre-là ni d’un droit au renouvellement ni d’une indemnité d’éviction comme dans le cadre d’un bail commercial. 

À noter : une résiliation anticipée du bail précaire est possible dans certains cas. Il en est ainsi lorsque le bail comporte une clause de résiliation anticipée.

Ce qu’il faut retenir du bail dérogatoire / précaire

Comme vous avez pu le constater, le bail de courte durée n’est pas dénué de complications. Le bail dérogatoire / précaire comporte son lot d’avantages mais également d’inconvénients. 

Prendre la décision d’opter pour un bail dérogatoire n’est pas simple. Si vous souhaitez affiner vos recherches afin de faire le meilleur choix possible pour votre activité commerciale, vous pouvez consulter  notre article sur les avantages et les inconvénients du bail dérogatoire /  précaire.

À noter : que vous soyez bailleur propriétaire de locaux commerciaux / professionnels ou professionnel locataire, vous avez la possibilité de vous faire conseiller par un avocat. L’avocat pourra vous apporter une véritable expertise en droit de l’immobilier commercial. Vous pourrez obtenir des conseils personnalisés pour votre entreprise (bail dérogatoire, expiration du bail, clause du bail ...). L’avocat pourra également vous renseigner sur l’état et l’application du droit mais aussi procéder à la rédaction d’un acte (contrat de location ou avenant).

Mise à jour le : 4 novembre 2020
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