Comment est géré le patrimoine immobilier d’un majeur protégé ?

Lors d’une vente d’un bien immobilier par un majeur protégé, il convient de prendre des précautions juridiques nécessaires afin d’éviter que l’acte de vente soit frappé de nullité
Sophie NOARO - Responsable du contenu
Sophie NOARO
Responsable du contenu
Publié le :
7 décembre 2021
Temps de lecture :
7 min

La gestion du patrimoine immobilier pour un majeur protégé

Pour réaliser une transaction immobilière, l’acheteur ou le vendeur doit être « sain d’esprit » (article 414-1 du Code civil). Ainsi un acte de vente ne peut pas être réalisé par une personne majeure protégée. En effet, si la preuve est apportée qu’au moment de la signature de l’acte authentique, une des parties était considérée comme incapable, le contrat est annulé de plein droit. Toutefois, quel que soit le régime de protection du majeur, il conserve sa capacité de jouissance, et les opérations immobilières pourront être réalisées ; seule sa capacité d’exercice de ses droits pourra être réduite ou retirée. 

Ainsi on peut se demander :  Comment est géré le patrimoine immobilier d’un majeur protégé ? Comment vendre ou acheter un bien en son nom ?

Quelles sont les différentes mesures de protection d’un majeur protégé ?

Selon la gravité de l’état de santé mental, les mesures de protection seront différentes. Il peut s’agir d’une sauvegarde de justice, d’habilitation familiale, d’une curatelle ou d’une tutelle. 

Qu’est-ce que la procédure de sauvegarde de justice ?

Selon l’article 433 du Code civil, la sauvegarde de justice est destinée au majeur dont les facultés mentales ou corporelles nécessitent une protection juridique temporaire.

La sauvegarde de justice est mise en place soit :

  • Par la décision du juge des tutelles
  • Par une déclaration médicale envoyée au procureur de la République en cas de refus du majeur de se faire examiner par un médecin.
  • Lors d’une mise sous tutelle ou curatelle, le juge des tutelles peut décider le temps de la procédure de mettre en place la sauvegarde de justice

À noter : La sauvegarde de justice ne peut pas excéder un an, renouvelable une fois pour la même durée 

La procédure de sauvegarde cesse : 

  • Sur décision du juge ;
  • Sur décision du procureur de la République à la suite de l’annulation de la déclaration médicale ;
  • Une fois le délai expiré ;
  • Lors de la mise en place d’une curatelle ou d’une tutelle.

Bon à savoir : Un majeur protégé sous mesure de sauvegarde conserve l’exercice de ses droits. Les tiers qui contractent avec lui n’ont aucun moyen de connaître sa situation sauf s’il décide de les en informer.

Lors de la procédure de sauvegarde, un mandataire spécial est désigné par le juge des tutelles afin d’accomplir un ou plusieurs actes déterminés comme la vente d’un immeuble. Notamment dans le cas où cette vente est devenue nécessaire dans le cadre de la gestion du patrimoine immobilier du majeur protégé.

De ce fait, la personne protégée ne peut, sous peine de nullité, passer un acte pour lequel un mandataire spécial a été désigné (C. civ. art. 435, al. 1).

Tutelle ou Curatelle : Quelles sont les procédures ?

Selon l’article 440 du Code civil, une personne qui souffre d’altération de ses facultés mentales ou corporelles et qui par conséquent l’empêche d’exprimer sa volonté a besoin d’être assistée ou contrôlée de manière continue dans les actes de la vie civile. Ainsi, selon le degré de protection nécessaire, le juge des tutelles mettra le majeur protégé sous curatelle ou sous tutelle.

À noter : la mise sous tutelle est plus protectrice que la curatelle. 

La procédure de mise sous tutelle ou curatelle est similaire, à savoir :

  • La demande peut-être présentée au juge par le majeur lui-même, son conjoint, un parent…
  • Un constat médical doit être présenté sous peine d’irrecevabilité. Il doit être réalisé par un médecin présent sur une liste établie par le procureur de la République. 

La durée de la mesure de protection ne peut excéder 5 ans, éventuellement renouvelables. 

À noter : toute procédure de tutelle ou curatelle sont opposables aux tiers et indiquées en marge de l'acte de naissance de l'intéressé. Ainsi le notaire lors de la rédaction de l’acte authentique pourra avoir connaissance de l’existence d’une mesure de protection éventuelle.

Sous curatelle, le majeur ne peut pas passer un acte sans consultation et assistance de son curateur. 

En cas de mise sous tutelle, le juge peut organiser un conseil de famille afin de désigner un tuteur soit parmi les proches soit sur la liste des mandataires judiciaires à la protection des majeurs. Un subrogé tuteur peut être désigné afin de surveiller les actes du tuteur notamment sur la gestion du patrimoine immobilier du majeur protégé.

Sous tutelle, le majeur protégé est frappé d’une incapacité d’exercice et ne peut signer aucun avant-contrat ou acte authentique de vente ou d’achat. Le tuteur se substitue au majeur protégé après l’accord du juge des tutelles sur les opérations engagées au nom de la personne protégée.

Qu’est-ce que l’habilitation familiale ?

Cette mesure de protection est entrée en vigueur le 1er janvier 2016. L’habilitation familiale peut être considérée comme une alternative à la curatelle ou à la tutelle. Dans ce cas, les personnes habilitées à représenter un majeur sont ses ascendants, descendants, frères et sœurs, le conjoint, ou encore le concubin. 

Les procédures de mise sous protection sont identiques à la tutelle ou curatelle.

Vente immobilière et majeurs protégés : Quelles sont les conditions à respecter ?

Lors d’une opération immobilière concernant un majeur protégé, certaines précautions juridiques doivent être prises sous peine de nullité du contrat. 

Majeur protégé sous tutelle : Quelle procédure pour la vente d’un bien ?

Une transaction immobilière sous tutelle ne peut être faite qu’avec l’autorisation du juge des tutelles. En effet, après avoir étudié la situation du majeur protégé, notamment son intérêt financier et patrimonial, le juge autorise l’acte en mentionnant les conditions et éventuellement le prix de la transaction. Pour cela, des estimations précises du bien immobilier doivent être réalisées par des professionnels tels que notaires, ou agence immobilière.

Toutefois, un compromis de vente ne doit pas être rédigé sous condition suspensive de l’autorisation du juge des tutelles. 

Ainsi le tuteur est autorisé à réaliser la vente immobilière au nom du majeur protégé selon les conditions fixées par le juge des tutelles. Une fois la transaction finalisée, le prix de vente doit être versé sur un compte autorisé par le juge. 

Majeur sous curatelle : Quelle procédure pour la vente d’un bien ?

À la différence de la tutelle, le majeur sous curatelle doit signer conjointement avec le curateur tous les actes concernant l’opération immobilière. Il ne peut effectuer aucune transaction sans la présence de son curateur. 

Cependant, si pendant la signature de l’acte authentique, il s’avère que la santé du majeur protégé s’est aggravée, le contrat de vente peut être annulé pour « insanité d’esprit » conformément au droit commun.

À noter : Dans le cas où l’opération immobilière concerne la résidence principale du majeur protégée, le juge des tutelles doit donner son autorisation, quel que soit le régime de protection.

Quelles sont les sanctions en cas non-respect des procédures ?

L’irrégularité des actes est sanctionnée par la nullité dans les conditions suivantes : 

  • Si le majeur protégé a agi seul sans l’assistance du curateur ou du tuteur, l’acte ne peut-être annulé que s’il est établi qu’il a subi un préjudice ; 
  • Si le curateur a agi seul sans l’assistance du majeur protégé, l’acte est frappé de nullité sans qu’il soit nécessaire de justifier d’un préjudice. Idem si le tuteur a agi sans l’autorisation, du juge ou du conseil de famille. 

Une action en nullité s’éteint dans le délai de 5 ans et peut être menée soit par le majeur protégé, le curateur, le tuteur ou par les héritiers en cas de décès. 

Majeur protégé : la priorité à la protection de son patrimoine immobilier

En effet, le patrimoine immobilier de la personne protégée doit être conservé à sa disposition le plus longtemps possible. Dans le cas où la vente des biens est inévitable et dans son intérêt, l’acte devra être autorisé par le juge des tutelles.

Il convient d’être prudent lors de la signature avec un majeur protégé et de vérifier si l’acte de vente ou d’achat ne risque pas d’être frappé de nullité. Ainsi, la présence d’un notaire ou d’un avocat spécialisé en droit immobilier s’avère essentielle à la bonne réalisation de la transaction.

Infographie sur la vente immobilière pour majeur protégé
Mise à jour le : 7 décembre 2021
Notez cet article
(2 notes)