Qu’est-ce que le droit de préemption de la Safer ?

La loi autorise la Safer à préempter des biens agricoles ou ruraux afin de favoriser l’installation ou le maintien d’exploitants agricoles ou forestiers.
Sophie NOARO - Responsable du contenu
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Publié le :
7 janvier 2022
Temps de lecture :
7 min

Qu'est ce que le droit de préemption de la safer ?

Les sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural (Safer) disposent d’un droit de préemption sur les biens ruraux ou des exploitations agricoles. En effet, leur mission est de maintenir la vocation agricole du bien ; d’éviter les surenchères, de favoriser le développement local et de protéger l’environnement. C’est pourquoi elles sont systématiquement informées des projets de vente de biens ruraux par les notaires et peuvent de ce fait acheter le bien en priorité. 

Ainsi on peut se demander : quels sont les biens préemptés par la Safer ? Quelles sont les limites de ce droit de préemption ? Quelle est la procédure ? Quels sont les droits du vendeur ? peut-on contester ou la préemption de la Safer ?

Quels sont les biens qui peuvent être préemptés par la Safer ?

Lors de la cession de biens ruraux, les SAFER doivent en être informées par le notaire chargé de la vente, conformément à l’article L 141-1-1 du code rural et de la pêche maritime. 

Ainsi, sont concernés par le droit de préemption de la Safer, les biens suivants :

  • Les biens ruraux : Bien que non définit avec précision par la loi, ils comprennent : 
  • Les immeubles bâtis ou non à usage agricole quel que soit la superficie et la situation. Peu importe également qu’il soit classé dans une zone agricole, naturelle ou encore forestière. 
  • Les immeubles, bâtis ou non situés en zone non constructible
  • Les bois et forêts enregistrés ou non comme tels au cadastre.
  • Les exploitations agricoles ou forestières à savoir les immeubles, mais aussi les biens immobiliers s’ils sont vendus simultanément. 
  • Les parts et actions de société ayant pour objet principal l'exploitation ou la propriété agricole : c’est le cas des titres des SCEA (sociétés civiles d'exploitation agricole) et SARL agricoles. Toutefois les parts de GFA (groupements fonciers agricoles) ou GFR (groupements fonciers ruraux) sont aussi concernés par le droit de préemption. 

Ainsi, que ce soit une vente, un apport en société, des échanges, une donation ou encore une donation-partage, la cession est à notifier à la Safer. 

Une fois notifiée la Safer mène une enquête sur le terrain, la préemption ne sera engagée toutefois qu’après accord de l’État.

Les limites du droit de préemption de la Safer !

Certains biens sont exclus du droit de préemption de la Safer, c’est le cas notamment des terrains destinés à la construction ou aménagements industriels. En revanche, l’acquéreur doit pour bénéficier de cette exemption s’engager dans un délai de 3 ans, à donner au terrain la destination prévue. 

Par ailleurs, les terrains destinés à la construction ne sont pas préemptables dans les cas suivants :

  • Construction de maisons individuelles : Toutefois le terrain doit être inférieur à 2500 m² par maison. Dans le cas contraire, la Safer peut préempter la totalité du terrain. 
  • Construction d’un immeuble d’habitation : aucune limite de superficie tant que la construction dans sa totalité utilise toute la superficie du terrain.

Ils existent d’autres cas ou la Safer ne peut pas préempter, à savoir :

  • Les terrains destinés à l’extraction de substances minérales, 
  • Les jardins familiaux s’ils sont situés à l’intérieur d’une agglomération et que leur superficie est inférieure ou égale à 1500 m².
  • Les Bois et forêts : Sont concernées les parcelles classées comme telles au cadastre. Ces terres ne sont pas préemptables, car elles n’ont pas une vocation agricole. Attention toutefois, le droit de préemption peut s’appliquer dans certains cas, notamment si le terrain est inférieur à 4 hectares. Article L331-23 du code forestier.

Quelle est la procédure de préemption ?

La notification de la vente à la Safer doit être envoyée 2 mois avant la date envisagée pour l’acte authentique. Elle peut être envoyée par LR/AR, par voie électronique sécurisée ou encore par acte d’huissier. C’est le notaire chargé de la vente qui s’occupe des formalités.

En effet, la notification doit être précise et indiquer toutes les informations concernant la vente, à savoir : 

  • L’identité du propriétaire et du futur acquéreur
  • La nature et la consistance du bien.
  • La désignation cadastrale des parcelles et leur localisation
  • Le prix et les conditions de la vente : il convient de distinguer le prix du bien, les commissions, les honoraires du notaire et les droits d’enregistrement. En effet, en cas de vente d'une parcelle boisée avec une autre à destination agricole, l'indication du prix de chacune d'elles permet à d’échapper à la préemption de la parcelle boisée. 
  • Les modalités de l’aliénation 
  • La clause suspensive
  • L’obligation de l’acquéreur de s’acquitter de l’éventuelle commission de l’agent immobilier. Il convient de préciser le montant et le nom du bénéficiaire. 
  • L’existence d’un bail rural au profit d’un preneur qui ne bénéficie pas d’un droit de préemption prioritaire
  • En cas d’apport en société : décrire les modalités de l’apport envisagé et la valeur attribuée au bien. 

Par ailleurs, la notification doit préciser s’il existe des obstacles à la préemption comme la nature de l’acte, la qualité des cessionnaires, la destination des terrains ou encore l’existence d’acquéreur prioritaires. 

Il est en effet essentiel que la notification valant offre de vente précise toutes les conditions de la cession, à défaut celles-ci ne seront pas opposables à la Safer.

Que se passe-t-il lorsque le bien est préempté par la Safer ?

Lorsque la Safer fait jouer son droit de préemption, le vendeur peut se retrouver dans plusieurs situations. En effet, tout dépendra des conditions d’acquisition du bien par la Safer, à savoir : 

  • Les conditions de vente sont acceptées : la vente est considérée comme parfaite. Le vendeur ne peut pas renoncer à la vente ni modifier les conditions du contrat.
  • La Safer préempte une partie des biens vendus : c’est le cas lorsqu’une partie du terrain vendu est un bien non préemptable comme nous l’avons vu précédemment. 
  • La Safer conteste le prix de vente : dans ce cas elle dispose de deux mois à compter de la notification pour adresser une offre d’achat. 

Quels sont les droits du vendeur en cas de préemption ?

Le vendeur, comme l’acquéreur évincé, peut contester la préemption de la Safer. Pour cela, la demande d’annulation devant le tribunal judiciaire compétent doit être réalisée dans les 6 mois à compter de la notification de la Safer. Le recours à un avocat est obligatoire, il rédigera une assignation, qui demandera l'annulation de la décision de préemption, et qui sera délivrée à la SAFER par un huissier. Cette assignation est une convocation à une première date d'audience.

À noter : dans le cas où le vendeur ne conteste pas la préemption, mais qu’il refuse de signer l’acte de vente, il risque d’être condamné à signer l’acte de vente dans un délai imparti sous astreinte. En d’autres termes, il devra indemniser la Safer. 

Dans le cas où la Safer ne préempte que partiellement le bien, le vendeur à plusieurs solutions, comme :

  • Exiger dans un délai de 2 mois que la Safer achète l’ensemble des biens 
  • Accepter la préemption. 

Toutefois en cas d’acceptation de la préemption partielle, il peut contester le prix dans le cas où la valeur de chaque bien n’est pas indiquée dans la notification ou lorsque la Safer souhaite acheter à un prix différent. Pour cela, le tribunal judiciaire compétent doit être saisi dans un délai de 15 jours.

Par ailleurs, le vendeur peut exiger que la Safer l’indemnise de l’éventuelle perte de valeur des biens non préemptés.

Pour finir, lorsque la Safer réalise une contre-offre, le vendeur peut :

  • Accepter la vente
  • Retirer le bien de la vente. En revanche, s’il souhaite le vendre ultérieurement, une nouvelle notification devra être envoyée à la Safer. 
  • Demander la révision du prix auprès du tribunal judiciaire. Le juge fixera le prix, par la suite, le vendeur peut toujours retirer le bien de la vente en cas de désaccord sur le prix.

À noter : Si le vendeur ne donne pas de réponse à l’expiration du délai de 6 mois à réception de la proposition de la Safer, il sera considéré que l’offre est acceptée au prix proposé.

Safer : un droit de préemption contestable ?

En cas de contestation de la décision de préemption par la Safer, le juge peut annuler si les points suivants ne sont pas respectés :

  • La décision de préempter doit être signée par le président du conseil d’administration de la Safer ou par un délégataire autorisé, 
  • La notification doit être envoyée par LR/AR aux différentes parties
  • La décision de préempter doit être motivée avec précision. 
  • Le bien doit être évidemment préemptables et sa surface doit respecter les minimums fixés par décrets, variables selon les territoires.

En conclusion, lors de la vente d’un terrain agricole ou de biens ruraux, il convient de se rapprocher de son notaire ou d’un avocat spécialisé pour savoir si le rien risque d’être préempté par la Safer. 

Infographie sur le droit de préemption de la safer
Mise à jour le : 7 janvier 2022
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