Gérer la concurrence en franchise : le cas des restrictions autorisées

Protégez votre activité en gérant l’impact de la concurrence sur le réseau de franchise tout entier ! Dans cet article se trouvent les essentiels pour y parvenir avec excellence. 
Aminatou Tall - Rédactrice web
Aminatou Tall
Rédactrice web
Publié le :
26 octobre 2023
Temps de lecture :
4 min

Cas de restrictions autorisées dans la gestion de la concurrence

Dans le commerce intervient un principe : celui de la libre concurrence. De ce fait, les acteurs économiques ont l’interdiction de brider leur concurrents sur le marché et ces interdictions sont articulées par la doctrine. A l’instar, le Code de commerce énonce, dans son article L. 420, un certain nombre de pratiques susceptibles de revêtir un caractère anticoncurrentiel. 

Toutefois, si ces pratiques sont prohibées, elles ne le sont pas de façon absolue. Selon les situations, certaines pratiques peuvent présenter un caractère d’exception à cette interdiction. Focus sur ces exceptions du droit. 

Le franchiseur bénéficie donc d’exemption sur certaines pratiques anticoncurrentielles. Ces exemptions sont rendues licites par le Règlement d’exemption n°2022/720 du 10 mai 2022.

1 - Les interdictions liées aux obligations du franchisé

La doctrine ne propose aucune liste de clauses répondant spécifiquement aux critères de l’article L. 420 - 4 du Code de commerce. En revanche, il est possible de trouver au sein des Lignes directrices sur les restrictions verticales, dans la partie des “Accords verticaux contenant des dispositions relatives aux droits de propriété intellectuelle («DPI»)”, une liste d’obligations du franchisé permettant au franchiseur d’assurer la protection de son savoir-faire. 

Ces obligations répondent à des clauses qui sont fréquemment signées dans le contrat de franchise. Toute clause conclue dans le but de remplir ces obligations bénéficie alors d’une exemption, au vu du caractère anticoncurrentiel qu’elles peuvent revêtir. 

Note : Le texte des lignes directrices sur les restrictions verticales n’a aucune force obligatoire. Toutefois, il est fréquemment pris en compte par le Conseil de la concurrence dans sa prise de décision.  

2 - Les restrictions caractérisées : bien comprendre quoi interdire pour ne pas être en faute

Les restrictions caractérisées sont des pratiques anticoncurrentielles d’une gravité de restriction de la concurrence trop élevée pour bénéficier d’une exemption. Toutefois, il est intéressant de voir que l’étude de ces restrictions permet un avis plus nuancé sur ces questions. 

Le franchiseur peut-il imposer des prix à son franchisé ? 

L’imposition des prix est une pratique interdite. En premier lieu parce qu’en franchise, elle se heurte avec le principe d’indépendance du franchisé et ce qui pourrait entraîner une requalification du contrat de franchise en contrat de travail par la subordination qui se crée. Enfin, cette imposition des prix est contraire au droit de la concurrence. Selon, l’alinéa 1er de l’article L. 410 - 2 du Code de commerce, “ les prix des biens, produits et services relevant antérieurement au 1er janvier 1987 de l’ordonnance n°45-1483 du 30 juin 1945 sont librement déterminés par le jeu de la concurrence”. En outre, les droits interne et communautaire interdisent les prix fixes ou minima imposés découlant d’ententes faussant le jeu de la concurrence, punissant l’auteur d’une amende de 15 000 € au sens de l’article L.442-6 du Code de commerce.

Note : La prohibition des prohibition d’imposition des prix concerne le prix de revente de produits par des distributeurs, au regard des articles L 442-5 du Code de commerce et 4 du Règlement d’exemption du 10 mai 2022. 

Mais si les prix imposés sont strictement interdits, le droit français a rendu licite les prix conseillés et le maximum imposés. Cela à condition qu’une imposition indirecte des prix ne soit pas dissimulée. De ce fait, le franchiseur peut proposer à ses franchisés un prix qui pourra servir de repère et de point de convergence pour le réseau, tant que ce conseil n’oblige en rien le franchisé sur le choix de ces prix. Cette liberté doit être préservée et le franchisé ne doit pas se sentir lié au prix conseillé.  

En somme, la liberté du marché de fixer les prix est une composante essentielle de la libre concurrence et aucune atteinte ne saurait être justifiée, quant bien même le franchiseur voudrait protéger son activité. Dans le cas où un franchisé considère qu’un prix lui est imposé, il lui appartient d’amener les preuves de cette imposition qu’il subit.

Quelles limitations du franchiseur sont acceptables sur la vente du franchisé ? 

Les restrictions relatives au territoire ou à la clientèle à laquelle le franchisé à le droit de vendre sont en principe interdites. Dans le cadre de la franchise, c’est notamment deux problématiques qui se posent : la vente au-delà du territoire concédé au franchisé et la vente sur Internet. 

La clause d’interdiction de vente au-delà du territoire exclusif au franchisé ne bénéficie d’aucune exemption concernant les ventes passives et reste donc prohibée. Toutefois, il en est tout autre pour l’interdiction des ventes actives qui peut être autorisé . En effet, la doctrine distingue la vente passive de la vente active. La vente passive est celle qui n’est pas recherchée par le franchisé et existe à l’initiative du client. La vente active quant à elle est celle opérée après que le franchisé soit allé soit prospecter des clients en dehors de sa zone d’exclusivité. Le franchiseur est donc en droit d’interdire aux franchisés d’effectuer des ventes qu’il est allé chercher hors de son territoire, mais non de répondre aux demandes à l’initiative des clients. 

La même problématique s’applique sur Internet. En effet, le franchisé peut vouloir développer son activité sur Internet. Dans ce cas-ci, il ne contrôle pas les clients qui le démarchent. Ainsi, cette présence sur le web peut donc toucher aux intérêts du franchiseur ou d’autres franchisés, notamment en cas de zones d’exclusivité. Malgré cela, il est complexe pour le franchiseur de tenter de contraindre la vente du franchisé sur Internet sans se heurter au principe de libre concurrence. 

Toutefois, celui-ci bénéficie tout de même d’exemption pour protéger son réseau : 

  • l’interdiction du franchisé d’opérer des ventes actives sur Internet ; la vente active sur le web correspondant à “ un message non-sollicité, transmis par courrier électronique à des clients “, notamment en utilisant “ les bandeaux publicitaires ou des liens dans les pages de fournisseurs d’accès visant spécifiquement la clientèle concédée”
  • possibilité d’imposer des normes de qualité du site en faveur de l’image de l’enseigne
  • l’interdiction totale du franchisé de vendre sur Internet, “ admissible que si elle est objectivement justifiée” au regard des lignes directrices 

3 - Les cas des restrictions simples

La dernière catégorie bénéficiant d’une exemption sont les restrictions simples que composent la clause d’approvisionnement et les clauses de non-concurrence et non-réaffiliation post-contractuelles. 

Bénéficiant d’un article bien plus détaillé, il reste utile de mentionner que la clause d’approvisionnement a fait l’objet de multiples décisions rendues par le Conseil de la concurrence, lesquelles ont dans le temps permis de forger une validité de ce type de restrictions tant au regard du droit communautaire qu’interne. C’est donc de nombreux textes exprimant l’autorisation de cette restriction ainsi que ses limites que propose la doctrine. Aujourd’hui, cette restriction peut être mise en place par le franchiseur sans risque de nullité, sous les conditions des textes encadrants.  

Il en est de même pour les clauses de non-concurrence et non-réaffiliation post-contractuelle qui sont en principe une atteinte à la liberté de la concurrence. Leur validité est donc soumise à des conditions strictes et cumulatives, qui comprennent notamment l’intérêt légitime ou encore sa limitation dans le temps.

4 - Que comprendre des autorisations de pratiques anticoncurrentielles en franchise ?

Certaines pratiques anticoncurrentielles liées à la franchise bénéficient d’une exemption, prévue par le droit communautaire et le droit interne. En s’appuyant sur les conditions de validité de restrictions prévues par les textes, le franchiseur peut avoir recours à ces pratiques qui lui permettront de préserver son réseau. L’exemption n’existant que si les conditions de validité sont remplies, leur non-respect entraîne de facto la perte de cette exemption ainsi que des sanctions pénales. 

Mise à jour le : 26 octobre 2023
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